mercredi 13 janvier 2010

Identité sur la Montagne Sainte-genviève



L’identité était le sujet du jour sur la Montagne Sainte-Geneviève. On pouvait constater à quelques mètres de distance une illustration vivante de la double et scandaleuse appellation du Ministère de M. Besson : Ministère de l’Identité Nationale et de l’immigration. L’identité, celle des cartes d’identité d’abord, que les travailleurs sans papiers ne possèdent toujours pas alors qu’ils vivent travaillent, étudient en France. Une identité qu’on leur nie alors qu’ils sont dans les cuisines des restaurants dans lesquels nous mangeons à la carte justement, alors qu’ils construisent les maisons que nous habitons, qu’ils rendent chaque jour service à nos aînés. Une identité qu’on refuse à ces étudiants qui passent leurs examens avec succès mais qu’on expulse quand même, au-delà de toute logique humaine mais aussi économique ! Pour obtenir des droits, les travailleurs sans papiers manifestaient hier matin place du Panthéon en grand nombre soutenus par les syndicats ouvriers, les syndicats étudiants, la Ligue des Droits de l’homme, le Réseau Education Sans Frontière et les partis de gauche.

Au même moment, un peu plus bas, on notait la présence de gardes mobiles devant l’entrée du lycée Louis le Grand. Pourquoi ? il y a aussi des travailleurs sans papiers ici ? Non mais il y a un débat sur l’Identité Nationale, l’autre appellation du Ministère. On pouvait s’attendre dans ce temple du savoir à des échanges de qualité qui éviteraient le dégueuloir de propos racistes qui se lâchent trop souvent. Il n'y en a pas eu au cours de la table-ronde à laquelle Etienne Dolet a assisté mais pour l'élévation intellectuelle, il faudra repasser. Dans une enceinte scolaire et universitaire de cette qualité, nous aurions attendu –enfin !- l’échange entre scientifiques, les propos travaillés, les argumentations réfléchies chacun apportant dans sa spécialité une réflexion qui pourrait être mûrie, reprise, développée entre scientifiques, sociologues, juristes, philosophes, physiciens, historiens, etc. . Au lieu de cela nous avons un « échange de points de vue » de sous-préfecture à peine digne d’une banale émission de télévision entre un préfet, une Représentante Personnelle (!) au Proche Orient de N. Sarkozy, un président d’institutions culturelle, une représentante de la société civile, un membre de la communauté juive et un DRH de cabinet de commissaire aux comptes. Ah les concepts ne volaient pas haut. Que des discours convenus. « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil dans notre beau pays». Dans la France de notre représentante Spéciale du Président de la République, on prend des avions dans lesquels on entend parler de la grandeur de notre pays, de Victor Hugo, de Zola... Elle doit éviter le métro où on vous demande son identité à tout bout de champ quand on est noir ou maghrébin. Cette identité que les travailleurs manifestant place du Panthéon réclament. Les représentants de la société civile se sont exprimés souvent avec chaleur et émotion mais ce ne sont que des sentiments qui dégoulinent déjà à longueur de temps dans les médias. Non, un lycée se doit d’ouvrir une démarche scientifique, d’offrir à ses élèves de la réflexion, du savoir, d’apporter sa contribution à une pensée utile à la société qui débouchera sur une action politique digne de ce nom. La première tâche d’un citoyen et de son gouvernement c’est de nous former à lutter contre toutes les formes d’injustice et de discrimination. C’est ce qui se faisait place du Panthéon. Au lycée Louis le Grand, on en était loin.

Ce matin, il y avait deux images sur la colline Sainte-Geneviève, d’un côté des discours bon chic bon genre "à la future élite de la France" -le terme est revenu souvent dans la bouche des intervenants - qui de toutes les façons n’engagent que ceux qui les écoutent et de l’autre des travailleurs qui attendent qu’on les reconnaisse, qu’on les sorte de la clandestinité dans laquelle le Ministère de l’immigration et de l’identité nationale les cantonne. Ils attendent des actes, des papiers et la Justice. Aujourd'hui le cours de philo était dans la rue, pas dans la salle de conférence du lycée louis le Grand.